Notre système de sécurité sociale se fonde sur la solidarité. Cette volonté, issue de l’élan et des idéaux de la Résistance, est inscrite dans l’ordonnance de 1945 : « La sécurité sociale appelle l’aménagement d’une vaste organisation nationale d’entraide obligatoire qui ne peut atteindre sa pleine efficacité que si elle présente un caractère de très grande généralité à la fois quant aux personnes qu’elle englobe et quant aux risques qu’elle couvre».
Ainsi notre système de sécurité sociale, à la différence des assurances classiques, interdit la sélection des risques ainsi que la tarification au risque des « primes » (cotisations sociales). Elle apporte donc la garantie d’une mutualisation des risques au niveau de l’ensemble de la population, évitant l’exclusion de certains ou la sur-tarification des personnes à plus forts risques.
Certes, elle contraint chacun à cotiser continument pour chacun des risques, quand bien même il n’y est pas immédiatement exposé. Mais cette contrainte est en fait protectrice, car elle corrige notre « myopie » et notre préférence pour le présent : le bien portant sera assuré quand il sera malade sans hausse de cotisation, l’actif bénéficiera d’une retraite, le célibataire des allocations familiales… le moment venu.
Ce système a permis d’améliorer significativement l’état de santé des Français, d’augmenter l’espérance de vie de 3 mois par an depuis 20 ans, de réduire la mortalité infantile de 5 % en 1950 à 0,3 % aujourd’hui, de diminuer les inégalités en soutenant les plus démunis via diverses prestations, ou de maintenir une dynamique démographique parmi les plus élevées d’Europe grâce au versement des allocations familiales. Il a accompagné les évolutions de la société et a contribué au progrès médical, ce qui lui vaut d’être reconnu en Europe et dans le monde.
Comme la plupart des pays européens, la France a choisi en 1945 de construire un système de sécurité sociale visant à couvrir l’ensemble de sa population, au travers d’une affiliation obligatoire qui s’impose à la fois aux employeurs, aux salariés et aux travailleurs indépendants.
Cette volonté, issue de l’élan et des idéaux de la Résistance, est inscrite dans l’exposé des motifs de l’ordonnance du 4 octobre 1945 : « La sécurité sociale appelle l’aménagement d’une vaste organisation nationale d’entraide obligatoire qui ne peut atteindre sa pleine efficacité que si elle présente un caractère de très grande généralité à la fois quant aux personnes qu’elle englobe et quant aux risques qu’elle couvre".
Ce principe de l’affiliation obligatoire aux régimes de sécurité sociale, qui s’accompagne d’un monopole de droit des organismes de sécurité sociale, est régulièrement remis en cause, par des mouvements de « désaffiliation », de contestation.
Cette remise en question de l’affiliation obligatoire est fondée sur trois critiques :
Le principe de l’affiliation obligatoire aux différents régimes de Sécurité sociale est un des piliers de la solidarité nationale, et répond aux exigences du préambule de la Constitution de 1946, qui s’imposent au gouvernement et au parlement lorsqu’ils légifèrent.
10. La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement
11. Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence
Extrait du préambule de la Constitution du 27 Octobre 1946
Au travers de ce principe, deux types de solidarité s’exercent :
L’affiliation obligatoire à la sécurité sociale est la clé de voute d’un système qui permet à la fois de conjuguer la couverture complète de l’ensemble de la population par des régimes universels, l’équité de traitement des assurés et des entreprises, et la maîtrise des dépenses et des coûts de gestion.
A la différence des assurances classiques de personnes ou de biens, un système d’assurances sociales tel que la sécurité sociale, par sa généralité, interdit la sélection des risques, ainsi que la tarification au risque des « primes » (cotisations sociales) que versent les assurés et les entreprises. Elle apporte donc la garantie d’une mutualisation des risques au niveau de l’ensemble de la population, évitant l’exclusion ou la sur-tarification des plus forts risques. Certes, elle contraint chacun à cotiser « continument » pour chacun des risques, quand bien même il n’y est pas immédiatement exposé.
Mais cette contrainte est en fait protectrice, car elle corrige la « myopie » des acteurs et leur préférence pour le présent : le bien portant sera assuré quand il sera malade sans hausse de cotisation, l’actif bénéficiera d’une retraite, le célibataire des allocations familiales… le moment venu.
Le même constat est applicable aux entreprises : si chaque entreprise assure seul ses salariés, elle se met en situation de devoir faire face, un jour, à un niveau de risque « catastrophique » ou inassurable. Enfin, dans un système de retraite par répartition, où les cotisations des actifs payent les pensions des retraités, il n’est pas possible de permettre un « opting out », car cela rompt à la fois le pacte entre les générations et l’équilibre des régimes de retraite.
Le caractère obligatoire qui s’impose à l’ensemble des entreprises constitue également une garantie d’égalité de concurrence pour le marché national : les coûts du travail ne sont injectés ni par les niveaux différents de protection sociale consentis aux salariés, ni par les caractéristiques (âge, sexe, handicap) des dits salariés. En externalisant et restructurant la prise en charge de leurs garanties (maladie, invalidité, maternité…) en dehors de l’entreprise, les salariés sont rendus plus égaux devant l’emploi.
La présence des partenaires sociaux, organisations d’employeurs, de salariés, de travailleurs non-salariés, et leur adhésion forte aux principes de la sécurité sociale attestent de cette volonté de faire bénéficier à l’ensemble de la population d’une couverture homogène et solidaire.
A l’échelle internationale, le fait que le niveau de développement de la protection sociale est relativement homogène, quoique différencié au sein de l’Union Européenne, réduit également les risques d’inégalité concurrentielle.
Ainsi que l’a jugé à de multiples reprises la Cour de Justice de l’Union Européenne, l’affiliation obligatoire et le monopole de la sécurité sociale sont pleinement compatibles avec les traités européens. De même, les juridictions nationales ont confirmé dans de nombreuses décisions le caractère illégal de la désaffiliation à la sécurité sociale au profit d’assurances privées.
Enfin, en prévoyant une couverture homogène des risques et un monopole de gestion des organismes de sécurité sociale, elle permet une maîtrise des dépenses et des coûts de gestion. La loi et les règlements encadrent les prestations qu’ils servent, la loi de financement de la sécurité sociale fixe des plafonds de dépenses et le niveau de leurs recettes.
A la différence des assureurs, ils ne peuvent pas répercuter une augmentation de la masse assurable ou de leurs dépenses d’indemnisation sur leurs primes d’assurance. Les exemples de mise en concurrence des organismes d’assurance sociale pour diminuer les coûts de santé n’ont pas fait la preuve d’une plus grande efficience. En atteste l’exemple des Etats-Unis, qui, avant la réforme de l’Obama Care, connaissaient un système conjuguant une part élevée des dépenses de santé dans le PIB (17% contre 11% en France), 45 millions de personnes sans aucune couverture santé, et des indicateurs de santé publique médiocres.
Par ailleurs, les régimes de sécurité sociale ne se livrent pas à une concurrence via des dépenses commerciales, marketing ou commerciales, pour augmenter leur nombre d’assurés, du fait de l’affiliation obligatoire par régime. Avec des réseaux de 4 caisses locales sous la responsabilité des caisses nationales, l’organisation de la sécurité sociale permet de rationaliser les coûts de fonctionnement et des systèmes d’information. Ainsi, les frais de gestion du régime général de sécurité sociale ne représentent que moins de 4% des prestations versées.
Evidemment, la situation de monopole des organismes de sécurité sociale ne doit pas les dispenser, bien au contraire, d’améliorer continuellement la qualité du service qu’ils rendent aux assurés et aux cotisations. Ces enjeux sont portés dans les conventions d’objectifs et de gestion conclues avec l’Etat. De même, l’Etat, le législateur et les organismes de sécurité sociale doivent veiller à adapter les prestations et la gestion du risque pour rendre les dépenses de sécurité sociale plus efficaces et plus ciblées, et lutter sans relâche contre la fraude.
Plus de huit Français sur dix (82%) sont « attachés au modèle social français » et 90% d'entre eux voient comme une « chance de disposer d'une protection sociale plus forte que dans les autres pays », selon un sondage Harris Interactive de 2012.
La cour d'appel de Limoges a rappelé dans un arrêt du 23 mars 2015 le caractère obligatoire de l'affiliation, y compris pour le régime social des travailleurs indépendants. La Cour a confirmé que l’obligation d’affiliation n’est pas supprimée par les directives européennes permettant à chacun de choisir son organisme assureur dans un autre État de l’Union.
Clairement, les juridictions françaises considèrent que les directives de l’Union européenne relatives à l’assurance ne sont pas applicables aux régimes légaux de sécurité sociale fondés sur le principe de la solidarité nationale dans le cadre d’une affiliation obligatoire des intéressés et de leur ayants droits, ces régimes n’exerçant pas une activité économique.
Pour aller plus loin
Les conventions d’objectifs et de gestion des régimes de Sécurité sociale
L’annexe 2 au PLFSS relative aux objectifs et moyens des organismes de Sécurité sociale sur le portail de la Sécurité sociale